Dossier 18 Vertières 2024 : un rapport de l’ULCC miné par des zones d’ombre et des incohérences

Le rapport de l’Unité de Lutte contre la Corruption (ULCC) sur l’utilisation des dix millions de gourdes allouées à la commémoration du 18 novembre 2024 au Cap-Haïtien suscite de vives interrogations. Entre contradictions comptables, failles procédurales et manque de preuves tangibles, le document, censé faire la lumière sur une éventuelle mauvaise gestion, soulève plus d’incertitudes qu’il n’en dissipe, selon un contre-rapport d’analyse du cabinet de la ministre Niola Lynn Octavius Devalis.

Le rapport de l’ULCC, présenté comme une enquête sur de possibles détournements de fonds publics, s’appuie essentiellement sur des témoignages oraux recueillis auprès de responsables administratifs et de collaborateurs ayant pris part à l’organisation des festivités. Cependant, ces déclarations ne sont étayées par aucune pièce matérielle — ni bordereaux, ni relevés bancaires, ni correspondances officielles —, ce qui affaiblit considérablement la portée probante du document. En l’absence de preuves concrètes, la crédibilité de l’enquête s’en trouve compromise.
Les chiffres présentés accentuent cette impression d’imprécision. Le rapport mentionne tour à tour 10 millions, 7,66 millions, 1 million et 808 000 gourdes, sans fournir de tableau explicatif ni de justification comptable claire. Ce jeu de montants sans cohérence apparente, conjugué à l’absence de pièces justificatives ou de reçus signés, donne à l’ensemble un caractère approximatif qui fragilise la démarche d’investigation.
Le document révèle aussi des lacunes sur le plan procédural. Certaines autorisations de dépenses et ordres de paiement évoqués ne sont pas accompagnés de leurs copies officielles. L’ULCC évoque des cumuls de fonctions entre plusieurs responsables — ministre, chef comptable, chef de la sécurité —, sans approfondir l’analyse juridique des risques de conflits d’intérêts. De même, plusieurs références légales sont citées sans explication précise de leur application au cas étudié, ce qui amoindrit la solidité de l’argumentation.
Sur la forme, le rapport souffre d’un déficit de rigueur administrative : absence d’inventaire exhaustif, annexes non indexées, pagination incomplète. Ces manquements ternissent la lisibilité du document et projettent une ombre sur la transparence du processus d’enquête.
En définitive, si l’intention affichée de l’ULCC était de mettre au jour d’éventuelles irrégularités dans la gestion des fonds dédiés aux commémorations de Vertières, le rapport publié n’apporte aucune preuve irréfutable de détournement. Les incohérences chiffrées, les failles méthodologiques et l’absence de documents probants limitent la portée de ses conclusions. Plutôt que d’éclairer l’opinion, cette enquête laisse planer le doute sur la gestion de l’un des symboles les plus sacrés de la mémoire nationale.
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